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Empreinte carbone et alimentation : l’impact sur la planète ?

Notre alimentation est ce qui nous rapproche le plus de notre environnement. Mais depuis plusieurs décennies, nos choix alimentaires sont aussi ceux qui dégradent le plus la santé de notre planète. Intervenant aux Journées francophones de nutrition, Fabrice DeClerck*, Agroécologue, insiste sur le fait qu’il est de notre responsabilité de modifier notre production alimentaire et notre consommation vers une alimentation saine et durable, en respect de l’écologie et d’une justice sociale planétaire.
Au-delà des concertations nationales et des décisions internationales, à chacun d’entre nous, 3 fois par jour, de prendre les bonnes décisions pour remplir notre assiette, de sorte qu’elle soit bénéfique pour notre santé et sans impact négatif sur notre environnement.

L’empreinte carbone de l’alimentation : une catastrophe écologique

Notre alimentation a de fortes répercussions sur notre santé, mais également sur la santé de la planète. Notre empreinte carbone alimentaire pèse lourd dans nos bilans carbone. Pour preuve, nous venons d’entrer dans une nouvelle période écologique appelée « anthropocène », qui signifie que désormais l’humanité a un impact planétaire (1). Autrement dit, tous nos actes et décisions collectives laissent à partir de maintenant une empreinte indélébile dans les couches écologiques, de sorte que l’alimentation est devenue un levier majeur dans les enjeux écologiques.

Dans les années 70, des concertations mondiales ont permis d’infléchir la courbe d’ozone. Mais de nombreux autres indices écologiques sont particulièrement inquiétants (2) :

  • La quantité d’eau douce disponible continue de chuter drastiquement. Or 70 à 80% de l’eau douce est utilisée pour l’alimentation.
  • Les mers et les océans sont impactés par les nitrates et les phosphates. 80% de cette pollution est due à notre système alimentaire.
  • 40% de la surface terrestre est dédiée à la production alimentaire. Cette déforestation est responsable de 80% de la chute de la biodiversité.
  • 30% du changement climatique est lié à l’alimentation.

Un comble, elle est aussi très insatisfaisante pour notre santé, avec 207 millions d’enfants qui souffrent de la faim, 2 milliards de personnes dans le monde touchées par des déficiences nutritionnelles et 2 milliards d’adultes en surpoids ou atteints d’obésité.

Changer notre mode alimentaire pour une meilleure santé humaine et planétaire

Selon une étude publiée en 2012 par Tilman et collaborateurs, modifier notre alimentation vers un régime sain et durable aurait un impact carbone considérable sur le changement climatique, les gaz à effet de serre, la disponibilité des sols (3). En plus des bénéfices sur notre santé, une alimentation par exemple méditerranéenne, végétarienne ou pescétarienne (régime végétarien autorisant les produits de la mer) aurait une contribution énorme sur notre capacité à respecter notre environnement dans des seuils acceptables (3).
Il existe donc une synergie évidente entre la santé humaine et la santé écologique.
Grâce à nos connaissances scientifiques dans ces deux domaines, nous sommes aujourd’hui en mesure de décrire les impacts de toutes déviations, mais aussi de planifier un futur durable et sain (4). Pour cela, il est nécessaire d’interagir avec la société afin de faire des choix responsables sur l’alimentation disponible, la façon de la produire et à quel coût.

 

Retour à une assiette saine pour l’Homme et durable pour la planète

L’assiette idéale pour la santé et la planète a été décrite :

  • 50% de fruits et légumes
  • 30% de céréales complètes
  • Faible proportion de viande bovine et de produits laitiers
  • Plus grosse proportion de protéines végétales

Pour la plupart des Européens, ce régime est moins couteux que l’alimentation actuelle. Pourtant, nous en sommes très éloignés, avec au niveau mondial une surconsommation de viande de l’ordre de 188%, de pommes de terre de 193% et d’œufs de 53%. Inversement, sont universellement sous consommés dans tous les pays et toutes les régions : les fruits, légumes, céréales complètes, graines et fruits à coque (5).

Au final, notre vision du régime sain pour l’Homme et la planète est très claire, et il est parfaitement possible de le mettre en pratique au quotidien. Dans ce domaine, nos choix sont des leviers majeurs.
À chacun d’entre nous de prendre les bonnes décisions, trois fois par jour, pour remplir notre assiette, de sorte qu’elle soit bénéfique pour notre santé et que l’empreinte carbone de notre alimentation ait un impact moindre.

En conclusion, si l’on considère tous les enjeux écologiques, l’alimentation n’est pas seulement un droit humain, mais également une responsabilité planétaire.

* Intervention de Fabrice DeClerck aux Journées francophones de nutrition (Marseille du 6 au 8 décembre 2023) : « La nutrition humaine : une responsabilité écologique de justice sociale et de santé humaine »

Fabrice DeClerck est Agroécologue (Montpellier), Directeur de la Fondation scientifique EAT qui se consacre à la transformation de notre système alimentaire mondial, intégrant la santé alimentaire et environnementale et la justice sociale, Directeur de recherche à l’Alliance of Bioversity et membre de la Commission de la terre (Earth Commission).

DeClerck FAJ et al., A Whole Earth Approach to Nature-Positive Food: Biodiversity and Agriculture. In: von Braun J, Afsana K, Fresco LO, Hassan MHA, eds. Science and Innovations for Food Systems Transformation. Cham (CH): Springer; January 2, 2023.469-496.

Sources
(1) Willett W et al., Food in the Anthropocene: the EAT-Lancet Commission on healthy diets from sustainable food systems, Lancet, 2019, 393(10170):447-92.
(2) Ripple WJ and 15364 scientist signatures form 184 countries, https://www.ird.fr/sites/ird_fr/files/2021-08/2017_Ripple_BioScience_Scientists_warning.pdf.
(3) Tilman D et al., Global diets link environmental sustainability and human health, Nature, 2014, 515(7528): 518-22.
(4) Hollis JL et al., Investing in early nutrition and food systems for human and planetary health, Lancet Child Adolesc Health, 2021, 5(11):772-4.
(5) GBD 2017 Diet Collaborators, Health effects of dietary risks in 195 countries, 1990-2017: a systematic analysis for the Global Burden of Disease Study 2017, Lancet, 2019, 393(10184):1958-72

 

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